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Témoignage d'un soldat du 63e RI

sur le siége de Metz

Extrait du carnet de campagne du soldat Clovis Hardy

Transcription réalisée par Alain Bertram - Fonds A.D.et F. Bertram -

Tous droits réservés


P49- munitions de guerre. Le colonnel du 63 ème voyant l'encombrement, nous fit changer de route et nous fit prendre un chemin qui conduisait dans les vignes, toujours au galop, jusqu'au fort Il était donc temps d'arriver pour nous reposer, parce qu'on était rompu. Mais une chose nous empêchait en arrivant il y avait des abeilles qui nous sifflaient aux oreilles.


Nous rentrâmes donc dans le fort. On nous fit placer autour des rempart face à l'ennemi. Mais nous n'étions pas bien. Il y arrivait toujours des bâles . Mais nous n'eûmes pas du mal quoique le fort était mal armé, et mal construit. Il y avait pour toute défense deux pièces de canon et les prussiens avaient porté presque toutes




P50- leurs forces sur ce point, pour exécuter la bataille du14 août etsachant que le fort était occupé par une armée bien minime et sans défence d'armements, ils avaient alors l'espoir de le prendre à l'assaut mais ils ont été trompés nos troupes qui étaient en avant du fort étaient bien inférieures aux leurs, et ont soutenu une terrible lutte pour pouvoir le défendre, ils éprouvèrent donc de nombreuses pertes bien plus nombreuses que nous. Alors ils tentèrent par finesse de rentrer dans un bois que l'on appelle la forêt de Grimon , en nous prenant par derrière, nous entourant et se croyant nous faire prisonniers mais ils furent trompé, ce jour là il n'y eut pas de trahison, les français




P51- étaient aussi malins qu'eux, car il y avait un chef de bataillon d'infanterie et un commandant d'artillerie qui avaient eu assez d'esprit pour comprendre leur mouvement, s'entendirent pour les tromper ; alors, le commandant d'infanterie fit placer son bataillon par peloton en laissant une distance environ de vingt à trente pas sur la lisière du bois et de sept à huit dans l'intérieur, le commandant d'artillerie suivit les mêmes principes, car il avait avec lui une batterie de mitrailleuses; alors il fit placer deux mitrailleuses entre chacun de ses pelotons et une fois placés, il fallait garder le plus grand silence.Je vous dirai que ces deux officiers s'étaient si bien entendu que l'on fut surpris, car il n'y avait aucun




P52- commandement de fait à haute voix pour l'exécution du feu, et qu'on les laisserait approcher à une distance de manière à pouvoir tous les écraser et que le signal de commencer le feu se ferait par un léger coup de siflet pour pouvoir les empêcher à se placer pour un cas de défence et à mettre leur armée en déroute.


Enfin revenons à la tentations des prussiens, ce qui avait été présumé par les officiers n'a pas été faus , le soir vers les huit heures, les voici qui s'avancent en colonne serrée sur l'endroit où ils croyaient passer, ils pouvaient être environ douze à quinze cent et nous de cinq à six cent et les voyant approcher à deux ou trois cent mètres de nous et au signal donné on leur




P53- lache tout à la fois les canons et les mitrailleuses. En voilà une partie par terre, et les autres en déroute. Mais ils approchaient sans faire le moindre bruit et ne nous voyaient pas, parce qu'il faisait déjà un peu nuit. Ils furent si tellement surpris, qu'ils n'eurent pas le courage de se tourner et nous tirer dessus. Mais nous, nous avons toujours répéter avec les canons. Il n'y en eu pas beaucoup qui échappèrent. On les voyait étendus par terre comme un nid de fourmis le lendemain et se croyaient plus forts que nous.


Enfin le feu cesse vers les neuf heures du soir, après que tout fut calme, chacun se retire et s'arrangent une place pour coucher à la belle étoile, sans camper. Les nuits commençaient à être fraîches, alors




P54- nous avions froid, couchés. Nous fûmes forcé de nous lever et faire du feu pour nous réchauffer et en même temps faire le café et la soupe après. Nous avons demeuré quatre jours à ne rien faire que le service de grande garde. Après quoi, le commandant du fort donna l'ordre qu'il fallait travailler pour la fortification du fort. Nous avons travaillé pendant une vingtaine de jours. Nous n'étions pas encore trop mal parce que nous touchions la ration de pain entière, et de tout en général. Après quoi on a commencé à nous retrancher la ration on l'a mise un pain de trois livres pour trois par jour. Ensuite on ne touchait plus de pain de soupe, et souvent pas de légumes et on ne mangeait plus de viande




P55- de cheval et on avait pas de sel pour la soupe. Ce qui faisait que le peu que nous avions à manger nous rebutait La nourriture non salée nous faisait mal au cœur et des coliques à tous et travailler encore neuf heures par jour; nous avons suivi ce régime pendant huit jours. On nous retranche encore une deuxième fois la ration qui était donc réduite, un pain de trois livres pour quatre ainsi çà commençait fort à dégénérer et le travail augmentait de plus en plus fort et nos forces diminuaient à grand train, nous mangions toujours du pain blanc, nous avons suivi encore ce régime pendant une douzaine de jours, quand tout à coup le Maréchal (Bazaine) ordonne en général une troisième fois la ration qui fut réduite à trois cent grammes par jour




P56- et ce n'était qu'un deuxième de farine avec huitième de sons afin de prolonger la nourriture et qu'elle dure plus longtemps. Mais pendant cette période de misère, la faiblesse augmentait de plus en plus fort, car il y avait de quoi faire pitié et on venait comme des vrais squelettes. Tous les jours, il y en avait des masses partant pour l'hôpital. Cette troisième période de retranchement de vivres dura donc du dix huit au vingt octobre où l'on nous retranche une quatrième fois la ration, réduite alors à deux cent cinquante grammes de pain par jour. Mais la ration de viande de cheval se montait à trois cent cinquante grammes par homme parce que les chevaux mourraient aussi de misère.







Nous vous conseillons de découvrir le carnet de campagne de Clovis Hardy sur le site de Alain, Dominique et François Bertram:


http://www.1870.bertram.fr/


" Les Loisirs de captivité d'un soldat français prisonnier de guerre à Ansbach, Bavière 1870 - 1871"




Tous nos remerciements à Alain Bertram.