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Au son du clairon la soumission, au coup de sifflet l'éternité

Les combats majeurs du 63e RI

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Jonchery-sur-Suippes 20 -21 décembre 1914



Jeudi 17 décembre 1914.


Le régiment est relevé et attend les ordres de marche au camp de Mourmelon (châlons). Une offensive doit être déclenchée dans les jours à venir, le 63e doit s'emparer des bois A et des bois B qui se trouvent entre la côte 117 et le village de Souain. Départ dans la nuit noire et glacée du 20 au 21 décembre 1914, l'angoisse aux tripes et le barda sur le dos on marche jusqu'à l'aube.(Extrait du JMO) (Extrait du JMO)




Lundi 21 décembre 1914.


Entre quatre et sept heures du matin les compagnies d'assaut s'incrustent en première ligne sur les parallèles de départ. Le temps change de nature et l'air devient électrique. Cette fois c'est sûr ça va barder, les hommes mettent les sacs à terre et vérifient leurs équipements.(Extrait du JMO)


Avant de s'engouffrer dans le néant on jette un dernier regard de tendresse sur la petite photo d'un être cher, on caresse de ses doigts sales et de ses ongles noirs cette image irréelle qui fait déjà partie d'un autre monde. Puis, d'un geste lent, on la glisse près de son cœur comme un talisman. Entre copains on s'échange des adresses au cas où …

-9 h 10

" Baïonnette au canon ! " le lieutenant Peret, vieux briscard a les yeux rivés sur son bracelet-montre

- 9 h 25

Il se fait apporter le drapeau du 63e et le déploie au-dessus de la tranchée.

- 9 h 29

La bouche sèche, le regard fixe et les mains moites, les hommes se tassent prêt à bondir hors de la tranchée ; personne ne parle, les mots n'ont plus de prise sur eux.

-9 h 30

Un coup de sifflet suivi d'un, "En avant, pour la France ! " la 11e compagnie s'éjecte de la tranchée. (Extrait du JMO)

Le terrible feu roulant s'intensifie, le vacarme des explosions d'obus est ahurissant. les hurlements saccadés des mitrailleuses qui crachent la mort est stupéfiant , comment ne pas rester tétanisé devant l'horreur qui les submerge ?


Ils n'ont pas encore fini de franchir le parapet qu'ils sont fauchés par grappes entières. " Courez ! Courez ! En avant ! Plus vite ! " Une course éperdue est engagée contre la mort. Courir à perdre haleine droit sur la ligne adverse courir pour aller s'écraser et se déchirer sur un fouillis infranchissable de barbelés et de chevaux de frise une barrière large de plusieurs mètres, infranchissable au pauvre fantassin. Pauvre, en cette fin 1914, le fantassin l'est aussi matériellement car il ne dispose même pas de casque pour se protéger des éclats métalliques qui, de leurs déchirements carnassiers n'épargnent ni la chair ni la terre. (Extrait du JMO)


- On ne voit aucun passage. Il faut tout de même "monter sur le tapis "

Source : J.Nouaillac sous-lieutenant au 63e RI le six-trois au feu édition Charles-Lavauzelle 1919 Page 51 -



Le casque Adrian de nos poilus ne commencera à être distribué aux unités qu'à partir du printemps 1915


La 12e compagnie s'élance à son tour, en face du bois A et du bois B. La 1ere et la 3e compagnies suivent le mouvement et s'éjectent d'un seul élan de leur tranchée protectrice. Elles se font elles aussi, décimer par le déluge de fer.(Extrait du JMO)


Sur toute la longueur du glacis, les obus de gros calibre, les balles de mitrailleuses boches déciment sans discontinuer, les petits hommes bleus qui courent comme des fous droits sur leur ligne. Ils tombent à une cadence vertigineuse. Dans cet enfer il parait impossible de ne pas être touché, impossible de rester intact. (Extrait du JMO)


Le tir de destruction des batteries françaises n'a pu creuser qu'une insignifiante brèche ou seule une petite poignée d'hommes commandes par le capitaine D'ARAGON arrive à franchir à force de ténacité et de courage. Le petit groupe de rescapés saute dans la tranchée ennemie mais peine perdue les braves submerger par le nombre, s'y font aussitôt envelopper, écraser ; pas un seul n'en réchappe vivant.




- 10 h


Sur le terrain les compagnies semblent avoir été absorbées par le terrain, il ne reste plus un homme debout. Entre les rafales de mitrailleuses et les déchirements d'obus on entend, plus ou moins distinctement, les plaintes, les râlements et les appels au secours des innombrables blessés qui gisent dans leur sang. Il faut attendre la nuit pour essayer d'aller à leur secours.(Extrait du JMO)


Ceux qui peuvent encore crier font partie des chanceux. Pour les autres une longue agonie commence. Ils savent que l'on ne pourra pas les localiser, qu'ils vont mourir dans la solitude la plus totale. Au crépuscule des rescapés transis rejoignent les lignes par leur propre moyen. Ils sont resté toute la journée exposés à la mort allongés sur la terre gelée sans pouvoir bouger.






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Témoignage du soldat Martial Chazaud.


" C'était effrayant, déclarent les survivants. On avait l'impression d'un grand massacre. On était le jouet des boches. Ils ne tiraient que sur ceux qui remuaient, qui tentaient de s'échapper

Source : J.Nouaillac sous-lieutenant au 63e RI le six-trois au feu édition Charles-Lavauzelle 1919 page52


La logique de l'absurde


11 officiers, 27sous-officiers et 400 hommes ont été sacrifiés dans cette attaque complètement insensée qui n'avait aucune chance de réussir. Ils ont été lancés, baïonnette au canon, sur des positions imprenables infestées de nids de mitrailleuses et d'engins de tranchée, sacrifiés à l'assaut d'un réseau infranchissable de barbelés, broyés par l'artillerie lourde qui battait chaque pouce de terrain.(Extrait du JMO)


Si le haut commandement avec ses œillères, était encore malgré cinq mois de guerre, prisonnier des théories d'avant-guerre où la charge à la baïonnette était reine, les poilus, eux, étaient bien conscients qu'on les envoyaient à la mort pour un gain dérisoire de quelques centaines de mètres carrés de terrain défoncé. Ils se rendaient compte qu'on n'hésitait pas à les sacrifier dans des attaques mal montées, mal coordonnées et mal soutenues par une artillerie qui, faute d'être lourde, ne pouvait être que timorée et inefficace contre des défenses allemandes qui devenaient en cette fin de 1914 déjà inexpugnables.



Sur les causes de cet échec, tous les témoignages sont unanimes, Pas de brèche dans les réseaux ; impossible de passer. Lutte-t-on avec des hommes contre du matériel ?

Source : J.Nouaillac sous-lieutenant au 63e RI le six-trois au feu édition Charles-Lavauzelle 1919



Page 52 - les commentaires du sous-lieutenant Nouaillac sont empreints de retenue mais ils ont le mérite d'aller aux fonds des choses, les poilus eux étaient plus directs, "on leur avait joué un sale tour de c… " (Extrait du JMO)



Souain

Jonchery - les ruines après les bombardements

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